Très jeune, à l'adolescence, j'ai découvert cette photo de Robert Capa. Scène terrible où l'histoire résonne de fausses notes insupportables. On y découvre tout ce que les hommes et les femmes ont été capables de faire de grand (Libérer la France de l'occupation nazi) comme de pitoyable (L'insoutenable lynchage collectif).
J'ai longtemps observé cette image. Elle m'impressionnait. Peut-être portait-elle en elle tout ce qui m'intéresse et m'effraie chez l'humain quand il oublie de l'être.
Tout y est, la joie, la terreur et le fait historique : en fond le drapeau de la France rappelle qu'en son nom les pires ignominies sont rendues possibles ; vidée de l'occupant, les rues d'une ville se remplissent d'une revanche malsaine et libèrent en groupe les pires pulsions ; une horde sauvage jette sa vengeance sur une femme coupable d'avoir aimé ou flirté avec un loup. Les visages ont l'arrogance des vainqueurs et les rictus de la haine. Sans qu'on soit vraiment convaincu que chacun ait été acteur de la résistance et de la victoire, (l'histoire sait être pathétique) on y retrouve des hommes et des femmes, des enfants et des anciens, des représentants de l'ordre et tous ces gens simples, tous ensemble muent par la même libération... des pires instincts.
Agrandissez l'image, regardez les grimaces et les expressions, la haine côtoie le bonheur, le mépris se compare aux souffrances des uns et aux petitesses des autres, certains sourires ressemblent à la pourriture…, on y voit tout ce qu'on aimerait ne pas y voir...
… Et ce monde fou, et cette foule toute entière tournée vers une seule. Cette foule et cette femme, seule, tondue. "Elle a couché avec l'ennemi !" Quand tous la dévisagent, elle a le regard fixé sur le seul être capable d'amour : son enfant, "l'enfant de la honte", disait-on, mais dans les bras d'une Mère.
Son crane chauve hurle cette innommable violence, le jugement d'hommes qui l'ont jetée à la vindicte populaire. Elle porte les stigmates d'un scandale qu'on ne comprend pas vraiment tant l'intime se mêle à l'histoire collective. Mais c'est avant tout son enfant qu'elle porte.
J'ai toujours trouvé horribles ces scènes de lynchage publique et cette déviance de l'histoire.
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